Sarah**, victime de violences conjugales, a souhaité nous faire part du cheminement qui lui a permis de se libérer de son contexte de violence. Témoignage, tout aussi émouvant qu’édifiant.
« Ce que je peux conseiller aux personnes qui vivent avec un conjoint toxique, c’est de se trouver un bon thérapeute, une bonne amie qui vous comprend (car tout le monde ne peut pas comprendre). Mais surtout faire ce chemin thérapeutique pour s’en sortir, c’est vital.
C’est comme un cancer de l’âme (ça fait mal et ça n’est pas palpable).
Pourquoi un psy ? Car c’est quelqu’un d’extérieur qui ne te juge pas, qui te comprend, qui t’éclaircit les choses tout en douceur et tous les jours, petit à petit, tu commences à cheminer et à ouvrir tes yeux sans que ce soit trop brutal.
Ce qui m’a donné la force d’agir, c’est mon bébé. J’ai accouché et le jour même j’ai commencé à ouvrir petit à petit les yeux. Et je me disais « tu n’as pas le droit de montrer ça à ton fils, c’est toxique pour lui » Tu as le devoir de le protéger, si tu l’as mis au monde c’est pour le préserver.
Les premiers indices sont venus de mon corps, qui me faisait des signaux, il faut juste savoir les écouter un tout petit peu. Si tu les décortiques avec un bon psychothérapeute, tu comprendras beaucoup de choses.
Par moment, je sortais de mon corps et je regardais ce qui se passait comme un « film extérieur de ma vie ».
Je n’arrivais plus à le regarder
Je n’arrivais plus à savoir où j’étais.
Qui est ce monsieur ? Un étranger ? Ou mon mari ?
Je me suis demandé « Est-ce que je suis folle ? Est-ce que j’invente tout ? ». Si tu as cette question dans la tête, alors dis-toi que c’est le début de la guérison…Enfin, ça en fait partie. Car un pervers narcissique ne se posera pas cette question même une demi-seconde.
Après, je faisais les choses comme un robot à côté de monsieur. Je n’étais plus moi-même. Au fur et à mesure, en décortiquant avec mon psy, j’ai compris que cette relation était toxique, et même plus, « invisiblement violente ». Car ton corps ne te fait pas des signaux pour rien.
Seule, tu ne peux pas faire ce travail. C’est limite impossible. Il faut oser demander de l’aide. Il ne faut pas hésiter à appeler au secours. Et plus tu avances, plus tu te demandes « est-ce que c’est normal que je ressente ça quand je suis à côté de lui ? ». Le psy te dit, non madame, c’est anormal. Là tu commences à comprendre, et ça s’achemine dans ton cerveau petit à petit, sans que tu y prêtes attention, Jusqu’au grand déclic. Et chacun son déclic. Moi c’était en mai dernier… Toute sa famille toxique était là, j’ai regardé le ciel et je me suis dit « mais qu’est-ce que je fais là ? » Et à partir de là je ne pouvais plus regarder mon mari de la même façon, il était devenu un étranger qui était entré chez moi. Mon corps sortait de moi, mon âme aussi…c’est difficile à exprimer… Je n’avais plus d’émotions, j’étais robotisée et j’avais peur d’avoir pu ouvrir les yeux…
Même encore parfois, je me dis « t’es sûre, t’invente pas ? Ce n’est pas possible que ce soit toi qui es vécu ça. C’est tellement dur, mais c’est vrai. Douloureux même de se l’avouer, mais on peut s’en sortir avec beaucoup de courage, un bon entourage, et de la patience. Courage à tous. »
** Le prénom a été modifié afin de préserver l’anonymat de la personne concernée.